La douleur est handicapante, inquiétante, frustrante. Avoir mal au dos, c’est aussi sacrifier plusieurs activités de loisirs et sportives. On se questionne sur l’évolution de nos symptômes dans le temps. La crainte de la douleur chronique nous guette constamment. Et si ma condition s'aggrave? Et s’il fallait me faire infiltrer, ou pire encore, opérer? Et si je devais arrêter mon sport favori pour toujours? Et si, et si...Tant que questions vous tracassent l’esprit! Anas, kinésithérapeute et spécialiste des maux de dos nous répond.
KALAE : comment en êtes-vous venu à vous intéresser au mal de dos au-delà de votre profession de kinésithérapeute ?
Anas : Je suis kinésithérapeute et me suis formé au Québec. Effectivement le mal de dos est devenu mon cheval de bataille. Pourquoi le dos ? 80% de mes patients consultent pour des douleurs dorsales. J'ai traité plus de 20 000 personnes souffrant de douleurs de dos, hernies discales, et autres douleurs physiques durant ma carrière, et ce à travers divers pays et continents. Et ce chiffre ne fait qu'augmenter jour après jour…
Je souhaite leur apporter une aide plus globale. Des gens qui ont mal au dos, je ne vois que ça au quotidien. Je constate qu’ils consultent seulement lorsque la douleur devient intolérable, et limite leurs activités quotidiennes. Souvent, ils n’ont pas fait ce qu’il fallait pour éviter l’aggravation de leur condition.
L’inaction et le repos ne guérissent presque jamais les lombalgies, bien au contraire! En voyant cette procrastination affecter l’état de mes patients, j’ai décidé de m’associer avec d’autres professionnels de santé pour mettre au point le site Lombafit. Pour des personnes qui souffrent de douleurs physiques, mais qui ne savent pas trop par où commencer. Nous avons aujourd’hui 200 000 visiteurs par mois. Ces personnes recherchent des solutions naturelles et efficaces visant à éviter la douleur chronique, les infiltrations et la chirurgie.
On y trouve toutes les informations sur le mal de dos, devenu le mal du siècle.
KALAE : Quels sont les maux de dos les plus courants observés ?
A. : Il s’agit principalement de la Hernie discale et de la sciatique.
Il me paraît important de s’assurer de bien diagnostiquer la pathologie. Beaucoup de patients souffrent d’une hernie discale sans le savoir. Une hernie discale ne doit pas obligatoirement stresser le patient car certaines sont asymptomatiques et on peut très bien vivre avec. Le problème apparaît lorsqu'il y a douleur. et on peut en guérir en adoptant des bonnes habitudes d’hygiène de vie : Exercices physiques, sport, alimentation.
KALAE : Qu’est-ce qu’une hernie discale ?
A. : La colonne vertébrale est faite de vertèbres et entre chaque vertèbre il y a des disques. Un disque intervertébral, je donne ici une image un peu cocasse : c’est comme un beignet avec de la crème à l’intérieur. Le beignet se compose du disque avec à l'intérieur un noyau gélatineux. Chaque fois que le noyau pousse sur les rebords, le gel à l’intérieur essaye de sortir, cela peut créer une déformation du disque. au lieu d’être circulaire il va se déformer. On appelle ça une protrusion discale. Dans certains cas plus avancées les fibres externes vont se déchirer et le gel pourra sortir du disque; et entraîner la hernie discale. Il existe plusieurs types de hernies discales. La hernie peut rester accrochée au disque ou se déloger. Lorsqu’elle elle crée un processus inflammatoire et ou une irritation d’une racine nerveuse, les nerfs descendent soit dans les jambes, c’est la sciatique (Dans 85 % des cas, la sciatique est causée par une hernie discale) soit dans les bras dans les cas de hernie discale cervicale. Le cas devient problématique : mal de dos, de la jambe, picotements, insensibilité.
KALAE : Quelles sont les premières actions à mener pour soulager la douleur ?
A. : Il faut dans un premier temps calmer l’inflammation : la glace peut très bien fonctionner (anti-inflammatoire naturel) puis les médicaments anti-inflammatoires si nécessaire. Toutes les techniques kiné, ostéo à savoir relâcher les muscles, diminuer les tensions, lubrifier l’articulation aident à calmer les douleurs. Certains petits mouvements très spécifiques qui viennent solliciter la région de façon progressive vont également calmer l’inflammation. Le dernier point consiste à retrouver une mobilité. Un dos est fait pour se mouvoir dans toutes les directions. Avec une hernie discale, le plus souvent la position penchée vers l’avant, ou assise prolongée est douloureuse. Il existe des techniques pour essayer de rétablir des mouvements qui indirectement vont aider : par exemple la méthode McKenzie essaye de chercher des directions de mouvements qui soulagent la douleur. Ceux qui soulagent sont beaucoup utilisés en kiné. La méthode McKenzie consiste en un système d’Évaluation et de Traitement des douleurs mécaniques du rachis, avec ou sans irradiation dans les membres (sciatalgies, cruralgies), basée sur la reconnaissance de syndromes et donnant priorité aux techniques d’autotraitement.
Puis il faut réveiller et renforcer les muscles : travailler les abdominaux transverses, le périnée chez la femme. ces muscles sont faciles à corriger, car il s’agit de mini-contractions;
Dernière étape : le retour aux activités avec un temps de transition.
Quand l’inflammation est trop intense : les infiltrations voire la chirurgie prennent le relais. Dans 90% des cas, on essaye d’éviter ces approches plus drastiques.
KALAE : Quelle est votre approche thérapeutique ?
A. : Quand on vient pour un mal de dos aigu, les traitements sont relativement simples. il faut calmer l’inflammation, mobiliser, regainer la mobilité, retrouver une fonction musculaire pour reprendre une activité.
Un mal chronique qui persiste dans le temps devient plus complexe. Les habitudes de vie, la qualité du sommeil, le stress, la nutrition viennent influencer ces douleurs plus spécifiques. Les massages et les mobilisations ne suffisent pas. De là m’est venue l’idée d’une approche plus globale et multifactorielle. J'ai suivi des formations sur le mal de dos chronique. On y enseigne des éléments de psychologie, de nutrition, d’exercices physiques plus avancés. Je m’y suis intéressé sans toutefois devenir expert. Quand cela dépasse mes compétences, j'envoie mon client vers un spécialiste : psychologue, nutritionniste etc. Cette approche m’a également ouvert la porte aux produits naturels et tout ce qui relève de la naturopathie, de l' homéopathie et des techniques manuelles. La formation classique en Kiné se méfie des approches naturelles sans validations scientifiques, mais au fur et à mesure de ma pratique j’ai constaté qu'elles avaient un réel intérêt. Alors pourquoi ne pas les utiliser ? De fil en aiguille j’ai changé mon point de vue à leur sujet.
KALAE : Quelles approches complémentaires recommandez-vous en cas de hernie discale, sciatique etc ?
A. : Tout d’abord adopter une alimentation anti-inflammatoire
j’insiste toujours sur les bienfaits d’une alimentation anti inflammatoire : je donne des listes d’aliments anti inflammatoires à mes clients ou les envoie vers des nutritionnistes ou naturopathes. Elle joue un rôle important dans le contrôle des douleurs. Les aliments anti-inflammatoires préconisés par les médecins ou nutritionnistes sont ceux dépourvus de glucose, pauvres en lipides et en protéines difficiles à digérer.
Parmi ces aliments anti-inflammatoires, on recommande généralement :
- Les poissons gras (riches en oméga-3), notamment le saumon, sardines, thon, maquereau, hareng, anchois, etc.
- Les viandes blanches (poulet, dinde, lapin, canard…).
- Les matières grasses comme l’huile d’olive, l’huile de tournesol, de noix, de colza, etc.
- Les légumineuses : lentilles, haricots secs ou les poids secs.
- Les oléagineux tels que les amandes, noisettes et les pistaches, sont extrêmement riches en antioxydants
- Les fruits rouges et les légumes pour leur richesse en antioxydants.
L’usage de certains produits naturels anti-inflammatoires :
Certains compléments alimentaires peuvent aider : multivitamines, certains produits à base de curcuma, vitamine D. Une déficience en vitamine D peut être liée aux douleurs chroniques. Il est évident que le traitement naturel ne constitue pas l'unique option thérapeutique pour permettre une guérison totale, mais le recours à ce type d’aide en complément du traitement chimique peut s’avérer très efficace pour lutter contre les douleurs de la hernie discale ou de la sciatique.
Voici une liste non exhaustive de plantes et d’huiles essentielles efficaces pour contrôler l’inflammation :
- Le curcuma. Grâce à ses pouvoirs anti-oxydants et anti-inflammatoires très puissants, le curcuma est l’une des plantes les plus utilisées dans un cadre culinaire et thérapeutique. La composition du curcuma est essentiellement faite d’huiles essentielles, de vitamines (B1, B2,B6,C,E,K) et d’oligo-éléments. Mais c’est à sa composition riche en curcumine et curcuminoides que l’on doit les propriétés anti-inflammatoires de cette épice.
- Le gingembre. Outre la saveur particulière qu’il apporte en cuisine et ses vertus aphrodisiaques, le gingembre est une racine très connue pour ses pouvoirs anti-inflammatoires. Le gingérol lui confère son action anti-inflammatoire. Il s’agit un composant actif agissant sur les douleurs inflammatoires liées aux maladies inflammatoires articulaires chroniques, notamment la polyarthrite rhumatoïde, le lupus, les maladies rhumatismales, etc. Il a été prouvé que cet élément actif est aussi efficace pour agir sur l’inflammation liée aux arthrites et à la sciatique. Le gingembre possède également d’autres bienfaits grâce à sa haute teneur en potassium et à sa richesse en oligo-éléments (calcium, magnésium, phosphore, sodium) et en vitamines (provitamine et vitamine B9).
- Les oméga-3. Les oméga-3 sont des acides gras polyinsaturés qui jouent un rôle très important dans le fonctionnement de notre organisme.Ils sont apportés par l’alimentation sous trois formes naturelles : l’acide docosahexaénoique (DHA), l'acide alpha linolénique (ALA) et l’acide éicosapentaénoique (EPA). Au-delà de leur action sur le cerveau et le système cardiovasculaire, les oméga-3 s’avèrent très efficaces contre l’inflammation. En effet, ils ont la capacité d’agir sur les mécanismes inflammatoires dans l’arthrose en freinant la destruction cartilagineuse, ainsi ils réduisent l’intensité des douleurs arthrosiques. La sciatique, étant le plus souvent liée à une inflammation secondaire à une hernie discale, elle peut aussi répondre aux oméga-3 à condition d’en consommer régulièrement.
- L’eucalyptus citronné. L’eucalyptus est une plante utilisée le plus souvent sous forme de tisane ou d’huile essentielle. Elle aurait des effets anti-inflammatoires qui lui conférent la capacité d’agir sur les douleurs ostéoarticulaires en générale et les douleurs de la sciatique en particulier.
- La gaulthérie. La gaulthérie est un arbuste dont on extrait une huile essentielle très intéressante. C’est l’une des huiles essentielles les plus utilisées en aromathérapie. Cette huile extraite de l’arbuste portant le même nom, est utilisée en massage pour soulager la sciatique et agit comme un antalgique. En effet, elle procure un effet chauffant grâce à sa capacité d’activer localement la circulation sanguine.
Faire appel aux Médecines alternatives
Certes, l’efficacité des thérapies alternatives a été, pour l’instant, l’objet de très peu d’études scientifiques. Néanmoins, certaines approches sont connues pour leurs effets antalgiques dans le traitement de la sciatique, hernie discale etc , parmi ces approches figurent :
- L’acupuncture
- La massothérapie
- Le chaud et le froid (cryothérapie)
- Le yoga thérapie
- Cupping thérapie (Ventouses)
- Tapis d’acupression
- Les cataplasmes de grand-mère
KALAE : Est on sujet à un risque de récidive sur un autre disque quand on a déjà été touché ?
A. : Malheureusement la réponse est génétique. Certaines personnes sont plus sujettes à ce type de dysfonctionnement des disques. Lorsque l'on sollicite le dos pour des raisons environnementales (travail etc) on risque plus de développer des hernies discales. On a pas vraiment de contrôle sur ces facteurs de risques. J’essaye de me concentrer avec mes patients sur des facteurs modifiables : l'exercice physique, le sommeil, une alimentation équilibrée peuvent aider.
Régler le mal de dos implique plusieurs petits éléments qui, additionnés ensemble, vont donner des résultats. Les manipulations ne suffisent pas.
Mes clients nécessitent généralement plusieurs séances pour une douleur chronique. En kiné je donne des exercices pour aider le client à trouver son autonomie. J’essaye de conseiller des exercices faciles à intégrer dans une routine quotidienne sinon les clients se découragent vite. Préserver son dos des douleurs demande une implication de tous les instants.
Anas, Kinésithérapeute - Lombafit
